Comment l'IA me sert pour nourrir mon travail (Régis Clinquart, Cassius Clay Communication)

Régis, pouvez-vous nous parler de comment l'intelligence artificielle a transformé votre manière de concevoir et rédiger pour la publicité et l'événementiel ?

Je me sers très peu de l'IA pour la conception-rédaction publicitaire.
Pour les tâches rédactionnelles (écriture de films et de spectacles, par exemple), je m'en sers principalement pour rechercher et compiler des informations qui serviront de matière pour l'écriture.
Pour les tâches de conception, en revanche, j'utilise beaucoup l'IA pour trouver des idées de scénographie, d'ateliers, de teambuildings, de teasers, d'icebeakers... Et d'autant plus que j'ai créé à ce jour une quinzaine d'assistants IA spécialisés (des GPTs, d'ailleurs accessibles gratuitement à tous sur le GPT store) pour automatiser et accélérer ces tâches.
Je me sers aussi de l'IA pour illustrer des concepts, créer des visuels en tout genre et des séquences de films.

Avec votre vaste expérience allant de campagnes pour des géants industriels à la formation en IA, pouvez-vous partager un projet spécifique où l'IA a joué un rôle crucial ?

J'ai pour l'instant très peu utilisé l'IA en pub (les agences me sollicitant surtout pour mes talents de concepteur-rédacteur).
En revanche, je l'ai déjà utilisée et je l'utilise de plus en plus dans la dynamisation de nombreux événements : pour faire créer des visuels en direct par des participants chez Guerlain, pour dialoguer sur scène avec l'IA chez Allianz, pour envoyer des vidéos personnalisées aux invités d'un événement Nestlé, pour générer des voix off ou pour créer des deepfakes humoristiques de célébrités chez Tout Faire...
Enfin, je crée de plus en plus de séquences IA intégrées dans les films que je produis. Dernièrement, pour les films d'ouverture de l'Africa Financial Summit et de la convention annuelle de Century 21.

Comment avez-vous aidé des entreprises de différents secteurs à adopter l'IA dans leurs stratégies de communication, et quels changements avez-vous observés dans leur approche publicitaire ?

Je propose des formations principalement aux agences de communication événementielle, mais je forme également les équipes de communication de sociétés assez diverses. J'ai par exemple formé aux IA génératives les équipes de communication interne de BNP Paribas, de la Fédération Française de Cyclisme, de Tout Faire et de la RATP.
Quant aux changements d'approche, c'est encore très frais et je ne peux pas réellement juger de l'adoption à ce stade.

En tant que scénariste et créateur de contenus artistiques influencé par l'IA, comment abordez-vous l'équilibre entre créativité humaine et automatisation ?

Comme je le disais, je fais rarement rédiger des textes à l'IA (quoi qu'elle puisse le faire - à ce jour, le meilleur outil est très certainement Claude 4 Opus). Je n'en ressens pas le besoin et - attention, ego trip - je me trouve bien meilleur que toutes les IA que j'ai testées pour la rédaction pure. Bon, je suis aussi écrivain (pour celles et ceux que cela intéressait, c'est ici : www.clinquart.com/), même si je ne publie qu'assez sporadiquement, donc l'écriture, c'est définitivement mon dada...

Pour les images, animées ou non, c'est différent : je ne savais rien faire, et maintenant oui. Mais un DA expérimenté utilisant les mêmes outils que moi ferait très certainement mieux. L'IA ne rend pas tout le monde super fort en tout, contrairement à ce qu'on lit et entend souvent, et à tort. Elle permet aux amateurs - dont je suis - et aux "moyens" de devenir bons, et potentiellement aux très bons de devenir encore meilleurs, ou d'enrichir leur palette. Mais l'écart de compétence demeure.

Qu'est-ce qui vous a incité à devenir formateur en intelligence artificielle, et comment voyez-vous le futur de l'IA dans la formation professionnelle ?

Je délivrais déjà (et délivre toujours) depuis quelques années des formations à l'événementiel : "Comment gagner plus souvent les appels d'offres", "Comment performer en soutenance de recommandation", etc.
Je n'avais pas prévu initialement de former à l'IA mais ma newsletter LinkedIn sur l'IA pour l'événementiel est très suivie et un beau jour, le Groupe OPA m'a demandé de former ses équipes. J'ai créé la formation et depuis, je ne cesse de la modifier et de l'enrichir au fil des formations que je dispense.

Selon vous, quels sont les défis éthiques les plus pressants liés à l'usage de l'IA dans la publicité aujourd'hui, et comment les adressez-vous avec vos clients ?

Les enjeux de confidentialité ne sont pas aussi insurmontables que certains se l'imaginent (on aime beaucoup se faire peur, en France...) dès lors qu'on utilise les bonnes IA avec les bons abonnements - sécurisés.
Les enjeux environnementaux, en revanche, sont bien réels (l'IA consomme énormément de ressources énergétiques), mais bien difficiles à résoudre à un niveau individuel. Il y a des solutions - comme faire tourner son IA en local plutôt que dans le cloud - mais assez insatisfaisantes. Le "salut", s'il arrive, viendra certainement des industriels : production d'énergie plus propre - pour laquelle la France, cocorico, est bien placée -, IA moins gourmandes en ressources (Deepseek, Mistral et les IA qui ont adopté une architecture de raisonnement de type "mixture of experts" ont ouvert des perspectives prometteuses), puces moins énergivores (Nvidia y travaille et les concurrents aussi, évidemment).

Enfin, il y a les enjeux d'atteinte au droit moral d'auteur, qui aujourd'hui concernent plus la relation artistes/sociétés d'IA que les utilisateurs finaux, mais ce ne sera pas forcément toujours le cas. Des procès sont en cours aux US, dont les issues seront certainement déterminantes.

Quelles évolutions anticipez-vous dans le domaine de la conception-rédaction, particulièrement sous l'influence de l'intelligence artificielle, au cours des prochaines années ?

Il est très difficile de faire des pronostics alors que ce qui semblait impossible hier (faire rédiger à une machine des textes susceptibles d'être confondus avec des textes rédigés par un humain) est désormais parfaitement possible et courant.

Dans un premier temps, on peut raisonnablement supposer que vont coexister des productions textuelles très moyennes rédigées intégralement ou presque par des IA (les exemples peu glorieux pullulent sur LinkedIn...), d'autres rédigées "à l'ancienne" et d'autres encore rédigées par des humains avec l'aide de l'IA.

Plus tard, les IA pourront-elles se substituer totalement aux CR, qui se contenteront au mieux d'orienter et de valider ou non les productions de l'IA ? Je ne l'espère pas, mais c'est à craindre.
(Merci de me donner l'occasion de finir sur cette note complètement pessimiste ;-) ).


Régis Clinquart est un concepteur-rédacteur augmenté par l'IA et scénariste freelance, spécialisé dans l'événementiel et la publicité. Il travaille avec CASSIUS CLAY COMMUNICATION depuis plus de 12 ans. Régis aide les marques à se démarquer en élaborant des stratégies de communication, en concevant des événements et en créant des campagnes publicitaires. Il possède plus de 20 ans d'expérience dans l'événementiel et a réalisé environ 1500 événements pour divers secteurs, tels que la banque, la pharmacie et l'automobile. En parallèle, il est formateur en intelligence artificielle pour les entreprises, offrant des formations adaptées aux agences de communication.

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