Au-delà de la prouesse technique, ce sont les paradoxes stratégiques de cette initiative qui interpellent. Loin des clichés sur une IA déshumanisante, cette approche révèle des bénéfices concrets et parfois inattendus pour le système de santé. Voici les trois révélations les plus marquantes de cette transformation en cours.
1. L'IA ne remplace pas le secrétariat, elle le sauve d'un déluge d'appels
La pression téléphonique sur les cabinets médicaux est immense et souvent sous-estimée. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : un médecin généraliste reçoit en moyenne près de 500 appels par mois. Cumulées, ces sollicitations représentent l'équivalent de 17 heures de travail dédiées uniquement à la gestion de ces demandes. Malgré les efforts des équipes, jusqu'à 40 % de ces appels peuvent rester sans réponse, faute de disponibilité.
Ces statistiques illustrent un véritable déluge d'interruptions constantes. Dans ce contexte, le rôle premier de l'Assistant téléphonique n'est pas de remplacer le personnel, mais bien de le renforcer. Preuve de cette philosophie, l'outil a été développé avec les soignants, secrétaires et télésecrétaires, qui ont été associés à toutes les étapes de sa création. En filtrant et en structurant les demandes, l'IA devient une alliée conçue par ses utilisateurs pour réduire la charge mentale et leur permettre de se consacrer pleinement aux patients présents au sein du cabinet.
2. Contre toute attente, l'IA est une bouée de sauvetage pour les personnes éloignées du numérique
On pourrait logiquement penser qu'une technologie aussi avancée que l'intelligence artificielle creuserait davantage le fossé numérique. Pourtant, l'une des révélations les plus surprenantes est que l'Assistant téléphonique de Doctolib améliore significativement l'accès aux soins pour ceux qui sont justement les moins à l'aise avec la technologie.
Cet outil a été spécifiquement pensé pour aider les personnes peu habituées aux outils numériques, notamment les personnes âgées ou celles touchées par l'« illectronisme ». Ce groupe, loin d'être anecdotique, représente 15 % de la population française âgée de 15 ans ou plus. Concrètement, l'IA leur permet d'effectuer une demande par téléphone sans jamais avoir à passer par le site ou l’application, et même de prendre rendez-vous en dehors des horaires d'ouverture. C'est un exemple puissant où la technologie, au lieu de créer une barrière, œuvre pour un accès aux soins plus équitable pour tous.

3. L'objectif n'est pas de soigner, mais de libérer du temps pour mieux soigner
Le fil conducteur des deux innovations de Doctolib n'est pas de se substituer au diagnostic ou à l'acte médical. Leur objectif est bien plus pragmatique : s'attaquer aux tâches administratives qui consomment un temps précieux, à une échelle de plus en plus large.
L'Assistant téléphonique prend en charge les demandes de rendez-vous ou de certificats. De son côté, l'Assistant de consultation, qui a déjà été utilisé dans plus de 6 millions de consultations, génère un compte-rendu structuré. La portée de cette approche se confirme par son déploiement systémique : l'assistant de consultation arrive désormais dans les hôpitaux – une avancée significative dans ce secteur – et s'ouvre à d'autres professions comme les kinésithérapeutes, psychologues ou ostéopathes. Dans un système de santé où l'épuisement professionnel est une crise silencieuse, l'objectif de Doctolib est donc moins technologique qu'humain : déléguer la logistique à l'IA pour libérer du temps et de l'énergie cognitive pour ce qui compte vraiment : l'écoute, l'échange et le soin.
En définitive, la révolution menée par Doctolib avec l'intelligence artificielle est moins une histoire de technologie futuriste qu'une réponse pragmatique à des problèmes profondément humains et persistants dans notre système de santé. En soulageant la pression administrative et en rendant l'accès aux soins plus simple pour tous, ces outils ne visent pas à remplacer l'humain, mais à lui permettre de se concentrer sur son cœur de métier.
Alors que l'IA s'occupe de la logistique, pourrons-nous enfin réinventer la relation patient-soignant ?