L’avocat du futur : traducteur entre technique et droit

Quand j’ai commencé à m’y intéresser, l’intelligence artificielle et la blockchain étaient des sujets presque “exotiques” dans le monde du droit. On en parlait beaucoup, mais peu de juristes comprenaient vraiment de quoi il s’agissait. Aujourd’hui, c’est l’inverse : tout le monde en parle, et beaucoup d’entreprises sont déjà confrontées à des questions très concrètes de conformité, de gouvernance ou de propriété des données. Le droit a dû s’adapter très vite. Ce que je trouve fascinant, c’est qu’on est passé d’un rôle défensif — encadrer la technologie — à un rôle constructif : utiliser le droit comme un levier d’innovation.

Quel impact pensez-vous que l'intelligence artificielle a eu sur le rôle traditionnel des avocats, et comment voyez-vous cette profession évoluer à l'avenir ?

L’IA a profondément changé notre façon de travailler. On délègue désormais certaines tâches répétitives aux machines, mais ce n’est pas une menace — c’est une chance. Le cœur du métier, c’est toujours la réflexion, la stratégie, l’interprétation. L’avocat du futur ne sera pas remplacé par une IA, mais par un confrère qui saura s’en servir. Ce que je constate, c’est que notre valeur se déplace : on devient des traducteurs entre la technique et le droit, entre les ingénieurs et les décideurs. Et c’est passionnant.

En tant que co-fondateur de #Hashtag Avocats, comment gérez-vous l'équilibre entre l'innovation technologique et les aspects éthiques et juridiques de l'IA et de la blockchain ?

C’est une question qu’on se pose tous les jours. Nos clients vont vite, parfois plus vite que la régulation, donc notre rôle, c’est de les aider à garder le cap sans freiner leur élan. On essaie d’avoir une approche responsable, sans tomber dans la frilosité. L’innovation n’a de sens que si elle crée de la confiance, pas de la confusion. Chez Hashtag, on croit beaucoup à cette idée : le droit n’est pas là pour dire non, il est là pour donner une forme solide à ce qui est nouveau.

Quel conseil donneriez-vous aux jeunes avocats qui souhaitent se spécialiser dans le domaine des nouvelles technologies, notamment l'IA et le web 3 ?

D’abord, d’être curieux. Ce n’est pas un domaine qu’on peut comprendre uniquement à travers les textes. Il faut tester, lire les white papers, comprendre le code, parler aux fondateurs. Et il faut aussi accepter de ne pas tout maîtriser — c’est un terrain en mouvement permanent. Ensuite, garder une boussole éthique. On ne travaille pas dans la tech pour “suivre la mode”, mais pour accompagner des transformations qui auront un impact profond sur la société.

Pouvez-vous partager un exemple d'un cas ou d'un projet particulièrement stimulant lié à l'IA ou à la blockchain qui vous a marqué et pourquoi ?

Il y en a beaucoup, mais je pense à un projet de tokenisation d’actifs réels qu’on a accompagné récemment. C’était un mélange de droit financier, de technologie et de stratégie internationale. Il fallait concilier MiCA, la réglementation locale, et les impératifs business. Ce que j’aime dans ce genre de dossier, c’est qu’on part d’une idée très conceptuelle — transformer un actif en jeton — et qu’on la rend juridiquement viable, sécurisée et exploitable. C’est là que le droit montre toute sa valeur.

Avec plus de 100 conférences et publications à votre actif, quel sujet lié à l'intelligence artificielle ou au web 3 trouvez-vous le plus crucial à aborder actuellement et pourquoi ?

Sans hésiter : la souveraineté numérique. L’IA, la blockchain, la donnée, tout ça pose une question de fond : qui contrôle quoi ? Si l’Europe ne maîtrise pas ses infrastructures, ses modèles et ses règles, elle subira les choix des autres. Je crois que c’est le grand combat de cette décennie : faire du droit non pas un outil de contrainte, mais un instrument de souveraineté et d’indépendance.

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