
Bonjour Bertrand, pourriez-vous nous parler de votre parcours et de votre rôle chez Alphalyr ?
Avec une mère ingénieur en informatique et un père prof de math, j'étais prédestiné à finir dans l'IA ;) Après Polytechnique, j'ai développé un premier Groupe, Baobaz, pour accompagner la transformation d'une centaine de retailers vers l'ecommerce, en Europe et Amérique du Nord. De Christian Louboutin à ETAM en passant par Zadig & Voltaire, l'enjeu était de faire basculer les brick & mortar en brick & click. Cela m'a permis de comprendre les défis de la transformation digitale dans le retail.
J'ai ensuite passé 10 ans à investir dans des startups dans l'IA avant de redevenir entrepreneur en co-fondant et développant Alphalyr, qui utilise l'IA pour aider les retailers à optimiser leurs marges sur la supply, le retail et le digital.
Aujourd'hui, Alphalyr, c'est 40 experts et la suite logicielle la plus complète, mais aussi la plus modulaire, pour piloter tout ou partie de l'activité d'un réseau. Nous aidons des retailers dans tous les secteurs du retail (luxe, mode, beauté, aménagement, grande distribution...) à automatiser et améliorer les décisions. Des entreprises comme Galeries Lafayette, Figaret, La Compagnie du Lit, Petit Bateau, Izipizi, et plus d'une centaine de retailers utilisent aujourd'hui nos solutions.
Comment l'intelligence artificielle a-t-elle transformé votre approche pour aider les entreprises à prendre des décisions plus éclairées ?
La chance qu'on a chez Alphalyr, c'est de travailler avec de très nombreux retailers avant l'arrivée des premiers LLMs (ChatGPT 3.5). Comme nous étions déjà connectés à leur système, nous avons pu rapidement proposer des solutions très innovantes, qui combinent les 4 piliers d'une IA qui apporte de la valeur :
- une très forte expertise métier
- un moteur de prédiction des ventes performant
- un savoir-faire en optimisation sous contraintes
- une équipe passionnée par la GenAI
En combinant ces technologies, nous avons pu rapidement améliorer nos cas d'usage qui connaissent une forte demande actuellement :
- le rééquilibrage inter-magasin
- l'optimisation de la démarque
- le pilotage de la performance magasin
- l'optimisation des parcours clients multicanaux
À vos yeux, quel a été le plus grand défi lors de l'intégration de l'IA dans le secteur du retail et comment l'avez-vous surmonté ?
Le plus grand défi est la gestion de la transformation au niveau des ressources humaines. On voit une grosse différence entre les équipes digitales, déjà habituées à jouer avec les algorithmes de Google et Facebook depuis de nombreuses années, et les équipes supply et retail qui sont encore beaucoup dans le monde Excel.
C'est notre responsabilité d'accompagner et de former pour que la bascule soit la plus rapide et fluide possible vers une nouvelle génération de systèmes beaucoup plus performants ! Il s'est passé la même chose lors de l'arrivée d'Excel il y a 30 ans... Il est temps de franchir une nouvelle marche de performance !
À l'époque où j'ai mené la transformation des retailers vers l'ecommerce, certains dirigeants disaient encore "c'est une mode" en 2010... Alors qu'Amazon avait déjà 15 ans !! Cela a conduit à des retards catastrophiques.
Il faut prendre conscience que la transformation par l'IA va aller beaucoup plus vite. L'erreur typique est d'avoir trop d'attentes à court terme et pas assez à long terme. Il faut se confronter aux tests, aux succès et aux échecs pour comprendre et changer la culture. C'est dur, mais c'est absolument essentiel pour survivre dans le monde de demain.
Pouvez-vous nous expliquer comment votre expérience chez Btwinz SaaS Ventures a influencé votre travail actuel avec l'IA chez Alphalyr ?
Le fait d'avoir investi dans 20 sociétés de l'IA nous a apporté une vision très réaliste à la fois des opportunités exceptionnelles qu'apporte l'IA, mais aussi de la diversité des cas d'usage qui arrivent ! C'est comme la découverte de l'électricité... Qui aurait imaginé qu'on allait inventer des fours micro-ondes, la climatisation ... Ou l'intelligence artificielle ?
On est dans la même configuration, notre imagination est la limite et tous les entrepreneurs travaillent sur l'application de l'IA dans tous les domaines de l'économie.
En tant qu'entrepreneur, je pense que nous faisons face à un océan d'opportunités. Le vrai risque, c'est d'être paralysé par la peur du changement. Il est inévitable, donc il faut foncer !
Quel est votre point de vue sur l'avenir proche de l'intelligence artificielle dans les entreprises, en particulier dans le domaine du commerce de détail ?
Prenons un parallèle pour comprendre. Il y a 40 ans, on avait accès à quelques films à la TV sur 4 chaînes. Un choix étroit et il fallait des millions d'euros pour faire un film. Il y avait très peu de producteurs/réalisateurs.
Aujourd'hui, vous pouvez monter un studio chez vous avec quelques centaines d'euros, publier sur YouTube et vivre de votre passion. Côté consommateur, chacun peut trouver instantanément et gratuitement le contenu qui l'intéresse dans n'importe quel domaine... Littéralement de la magie vu d'il y a quelques décennies.
Ce constat est vrai dans tous les domaines. J'ai cherché une cafetière il y a deux semaines chez Boulanger... 62 modèles différents étaient exposés !
En réalité, la conséquence principale de la révolution qui arrive, c'est l'explosion de la créativité. Les retailers agiles sauront comprendre et adapter leur sourcing et distribution à la demande et gagneront vite des parts de marché. Ceux qui resteront figés sur leur modèle disparaîtront progressivement.
N'oublions pas les contraintes sociales et environnementales. En tenir compte complique encore l'équation. Notre module de rééquilibrage permet d'optimiser les coûts mais aussi le bilan carbone par exemple.
Comment pensez-vous que la montée de l'IA impacte les compétences humaines traditionnelles et le management en entreprise ?
Le premier impact est que le CEO (Chief Executive Officer) doit progressivement devenir un CETO (Chief Executive Technology Officer). Il ne s'agit plus de gérer une organisation humaine, il s'agit désormais de gérer une organisation hybride homme + IA.
Ce constat est en réalité vrai à chaque niveau du management de l'entreprise. Tous les managers doivent se former à comprendre le monde de l'informatique et de l'IA. Ce sont leurs outils de demain.
Pour conclure : si l'IA bat de plus en plus souvent l'homme, n'oubliez jamais que l'homme plus l'IA bat toujours l'IA seule ;) On est fait pour travailler ensemble.
Quels conseils donneriez-vous à une entreprise de taille moyenne qui envisage de commencer à intégrer l'IA dans ses processus opérationnels ?
Pour une entreprise de taille moyenne, il est trop coûteux d'avoir une équipe dédiée à l'IA en interne. Pas de panique, les éditeurs sont là, et nous travaillons sans relâche à intégrer l'IA dans les processus métier.
Il faut augmenter votre veille sur les solutions du marché et ne pas avoir peur d'adapter votre organisation logicielle (comme vous le faites pour votre organisation humaine) aux évolutions du marché et à vos défis internes.
Aujourd'hui, il existe une solution technologique qui peut aider à résoudre chacun de vos problèmes.
Bertrand Fredenucci est le co-président d'Alphalyr, une entreprise spécialisée dans l'utilisation de l'intelligence artificielle pour faciliter la prise de décisions basées sur les données. Il a cofondé Btwinz SaaS Ventures, un studio de startups dédié au développement de solutions SaaS. Auparavant, il a occupé des postes clés dans des entreprises telles que Baobaz et Bain & Company. Bertrand est diplômé de l'École Polytechnique en économie et possède une vaste expérience dans le secteur de la technologie et du retail.