
Une adoption plus rapide que prévu
L’essor de l’intelligence artificielle générative a été fulgurant. En 2025, la majorité des entreprises ayant investi dans l’IA disposent déjà d’outils génératifs en production. 27 % d’entre elles déclarent même une adoption à l’échelle de l’organisation entière, contre seulement 13 % en 2024. Un bond significatif. Si l’on y ajoute les 33 % qui en font un usage limité à certains projets ou services, ce sont désormais 60 % des entreprises interrogées qui exploitent l’IAG au quotidien.
Cette dynamique dépasse largement celle des formes d’IA plus traditionnelles, basées sur des règles ou des modèles prédictifs. Elle dépasse aussi les propres prévisions des entreprises formulées en 2024. D’ici fin 2025, 40 % des entreprises prévoient une adoption généralisée de l’IAG, un rythme d’intégration rarement observé pour une technologie aussi récente.
Des échecs de projets en forte hausse
Mais cet engouement s’accompagne d’un revers de la médaille : la précipitation. L’étude met en lumière un chiffre inquiétant : 46 % des projets d’IA générative sont abandonnés entre la phase de preuve de concept et leur déploiement à l’échelle. En un an, le taux d’entreprises qui abandonnent la majorité de leurs projets IA avant la mise en production est passé de 17 % à 42 %.
Ce taux d’échec élevé illustre les difficultés rencontrées dans le passage à l’échelle. Les entreprises qui échouent le plus souvent signalent une résistance accrue de la part des employés ou des clients, mais aussi des inquiétudes croissantes en matière d’image et de réputation. À l’inverse, les organisations qui réussissent le mieux s’appuient sur une démarche plus structurée : elles sélectionnent les cas d’usage en fonction de la disponibilité des données, des risques, des enjeux de conformité, et non seulement sur l’effet de mode.
Moins de bénéfices perçus qu’attendu
Un autre indicateur préoccupant est la baisse généralisée de la perception de valeur ajoutée apportée par l’IAG. Sur tous les objectifs d’entreprise évalués, les effets positifs de l’IA générative sont en repli. Les entreprises citant un impact favorable sur la croissance des revenus passent de 81 % en 2024 à 76 % en 2025. Sur la gestion des coûts, la chute est similaire : de 79 % à 74 %. Même tendance sur la gestion des risques : de 74 % à 70 %.
Plus frappant encore, 46 % des répondants indiquent qu’aucun des objectifs stratégiques de leur entreprise n’a connu d’impact fortement positif grâce à l’IAG. Un constat dérangeant lorsqu’on considère les investissements consentis – souvent lourds – pour intégrer ces technologies.
Des bénéfices inattendus dans des domaines spécifiques
Tout n’est pas sombre pour autant. Si certaines applications populaires comme la génération de contenu ou la synthèse d’informations déçoivent, d’autres, moins attendues, commencent à révéler leur potentiel. Les domaines tels que l’interaction avec les systèmes internes, la conception et le prototypage ou encore la prospection commerciale ressortent comme des zones de valeur croissante.
Ces cas d’usage plus complexes sont étroitement liés à une nouvelle tendance émergente : les agents IA. Ces systèmes autonomes, capables d’enchaîner plusieurs tâches ou de prendre des décisions, suscitent un intérêt presque universel. 58 % des entreprises interrogées souhaitent mettre en œuvre des agents intelligents, et 40 % se disent ouvertes à leur adoption.
L’essor des agents IA : nouvel espoir ou nouvel eldorado ?
Les agents IA sont perçus comme la prochaine étape logique de l’IAG. Capables d’automatiser des processus complets, ils ouvrent des perspectives enthousiasmantes pour des entreprises en quête de gains de productivité. En particulier, les agents pourraient combler le fossé entre les attentes élevées et les bénéfices réels encore limités observés jusqu’ici.
Mais leur mise en œuvre impose de relever de nouveaux défis. Les entreprises adoptent diverses techniques pour améliorer la qualité, la pertinence et la sécurité des réponses générées : suivi en temps réel des réponses (55 %), affinement des modèles (48 %), mise en cache des réponses (38 %). Ces pratiques deviennent cruciales pour encadrer l’autonomie croissante des agents.
Sécurité, confidentialité et… coûts : les obstacles persistent
La sécurité des données et la protection de la vie privée demeurent des préoccupations majeures, citées chacune par 38 % des répondants. Néanmoins, ces préoccupations tendent à décroître, signe d’une certaine maturité. En revanche, un nouveau défi monte en puissance : le coût.
Le coût de mise en œuvre est désormais le principal critère de décision dans la priorisation des projets IA. Pire encore, c’est aussi le KPI (indicateur de performance) le moins bien noté dans les évaluations de succès. Non seulement la fréquence à laquelle le coût est cité comme un défi augmente légèrement, mais sa performance perçue diminue, ce qui inquiète les directions financières.
Pénurie de compétences : toujours un frein majeur
Autre frein persistant : le manque de talents. En 2024, 10 % des répondants plaçaient ce problème en tête de leurs préoccupations. En 2025, ils sont encore 8 % à le considérer comme la priorité n°1. Et 27 % reconnaissent que les pénuries de compétences restent un obstacle significatif.
Les secteurs industriels comme la fabrication, les télécommunications, la construction ou l’immobilier sont particulièrement touchés. Ce sont aussi ceux qui rapportent les retours sur investissement les plus faibles. Pour répondre à cette situation, les entreprises misent sur la montée en compétence : 49 % investissent dans la formation interne, tandis que 46 % font appel à des intégrateurs ou consultants externes.
Une gouvernance IA en progrès
Malgré les difficultés, des progrès sont constatés dans la gouvernance des projets IA. Les organisations utilisent désormais en moyenne 7,1 indicateurs de performance pour évaluer leurs projets, contre 6,3 un an plus tôt. Cela traduit un effort de structuration croissant et une meilleure capacité à piloter les initiatives.
Les investissements dans les outils de MLOps (Machine Learning Operations), qui facilitent le déploiement, la surveillance et l’optimisation des modèles, progressent également. 27 % des entreprises en sont déjà équipées, contre 24 % en 2024, et 42 % envisagent de s’y mettre dans les 12 prochains mois. Cependant, les entreprises les plus en retard pointent des usages IA encore trop limités, ou des difficultés à justifier le ROI des outils de MLOps.
Conclusion : une révolution en rodage
L’intelligence artificielle générative est incontestablement en train de transformer l’entreprise. Mais cette transformation est encore loin d’être stabilisée. Si l’adoption dépasse les prévisions, les résultats, eux, tardent à convaincre. Les taux d’échec grimpent, les bénéfices se font attendre, et les coûts s’accumulent.
Cependant, une minorité d’organisations parvient à tirer son épingle du jeu. Celles qui réussissent combinent rigueur méthodologique, sens de la priorisation, investissement dans les compétences, et attention portée aux risques et à l’éthique. Les autres devront apprendre à ralentir, à structurer, à tester plus finement, et à sortir d’une logique de « hype » pour revenir à celle de la valeur.
En 2025, l’IAG ne fait plus rêver aveuglément. Elle invite à une réflexion stratégique profonde, à un pilotage rigoureux et à un changement culturel durable. Le mirage s’estompe ; place à la réalité opérationnelle.
Les 5 enseignements clés du rapport 2025
Adoption massive : 60 % des entreprises ont déjà des outils génératifs en production.
Échec croissant : 46 % des projets sont abandonnés avant leur déploiement généralisé.
Bénéfices en recul : baisse perçue sur tous les objectifs stratégiques.
Coûts préoccupants : critère n°1 de décision et KPI le plus décevant.
Lueur d’espoir : les agents IA ouvrent une nouvelle voie vers des gains concrets.