
Pierre, en tant que CEO de 34 Elements, comment voyez-vous l'intégration de l'intelligence artificielle transformer le paysage des startups, et quelles opportunités principales identifiez-vous pour les entrepreneurs?
C’est un véritable tsunami.
Les acteurs déjà établis – séries A, B et C – sont en première ligne.
De nouveaux concurrents, plus agiles et agressifs, vont surgir rapidement.
Le même service sera proposé dix fois moins cher, ce qui fera vaciller tous ceux qui ne peuvent pas absorber une chute de 90 % de leurs revenus.
Votre expérience extensive en tant qu'investisseur vous a permis d'observer de près l'évolution de la technologie IA dans les startups. Qu'est-ce qui différencie les projets IA qui réussissent de ceux qui échouent selon vous?
Il est trop tôt pour trancher, mais l’anticipation est la seule posture viable.
L’IA évolue de façon exponentielle. Plutôt que de bâtir uniquement sur les capacités actuelles, il faut se projeter à quelques mois et se dire :
“Bientôt, ce sera possible… donc j’en tiens compte dès aujourd’hui dans mon développement.”
Autre point crucial : éviter le champ de bataille des grandes plateformes (OpenAI, Anthropic, etc.).
Si votre produit se place sur leur terrain, vous serez en concurrence directe avec elles… et la fin sera rapide.
Avec l'introduction en bourse et la revente de vos entreprises, comment avez-vous utilisé l'IA pour optimiser ou transformer ces processus, et quels enseignements en avez-vous tiré?
Lorsque j’ai vendu mes entreprises, l’IA en était à ses balbutiements et n’avait donc aucun impact réel.
En tant qu'auteur et podcasteur partageant des connaissances sur les startups, prenez-vous en compte l'impact de l'IA sur le contenu que vous produisez, et comment adaptez-vous vos messages pour refléter ces changements?
Le contenu de mes méthodologies est ever green. L'AI ne changera pas les fondamentaux, elle changera la vitesse d'exécution, la précision des décisions, l'automatisation, l'allocation des ressources ou la personalisation client. l’IA n’invente pas de nouveaux « fondamentaux », mais elle réinvente la mécanique : on passe d’une entreprise qui réfléchit et agit par cycles lents à une organisation auto-apprenante, ultra-personnalisée et presque temps réel. Ceux qui maîtrisent ces leviers creusent l’écart, non pas par leur vision, mais par la vitesse et la précision avec lesquelles ils l’exécutent.
Ayant dirigé un fonds d'amorçage ayant investi dans 54 startups, quelles recommandations donneriez-vous aux entrepreneurs cherchant à lever des fonds pour un projet intégrant l'IA?
Ne lève pas de fonds au démarrage.
Travailler avec l’IA consomme très peu de ressources et donc coûte peu ; c’est aussi très rapide. Il vaut mieux commencer sans financement extérieur.
Valide ensuite, le plus vite possible, que la monétisation est réaliste.
Si ce n’est pas le cas, change d’approche.
Une fois la monétisation prouvée, tu pourras envisager une levée pour accélérer la croissance commerciale.
Cette logique ne s’applique pas aux domaines deeptech, biotech, IA « platforme», quantique ou robotique, qui nécessitent souvent des capitaux lourds dès le départ.
Comment voyez-vous l'intelligence artificielle influencer la manière dont les entreprises américaines et européennes opèrent dans les années à venir, et quels secteurs sont les plus mûrs pour la disruption?
Les entreprises européennes dépendent largement des technologies américaines.
Si les États-Unis en restreignent l’accès, les sociétés européennes deviendront des acteurs de second plan.
Tous les secteurs sont concernés : aucun n’est vraiment à l’abri… sauf, peut-être, le fabricant de fromage de chèvre !
Enfin, quel rôle pensez-vous que l'éthique devrait jouer dans le développement et la mise en œuvre de solutions d'IA au sein des startups, et comment encouragez-vous les entreprises à prendre cela au sérieux?
La décision revient aux co-fondateurs ; elle reflète leurs valeurs.
Il en va de même pour les investisseurs, guidés par leurs propres convictions.
Je n'encourage rien, je n'ai aucunes leçons à donner, chacun prends ses responsabilités.
Pierre Gaubil est un entrepreneur et investisseur, PDG de 34 Elements, co-fondateur de 3 entreprises, dont une cotée en bourse et deux vendues. A dirigé des entreprises internationales aux États-Unis et en Europe. Directeur général d'un fonds d'amorçage américain qui a investi dans 54 start-ups. Rédacteur pour The Startup et Data-Driven Investor. Podcasteur pour Silicon Carne/ Marketing Square / Tech 45 / 34 Elements. Auteur du livre "Startup Unlocked".